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L’institution dite “ribat” est trop complexe et trop étendue géographiquement pour être sérieusement définie seulement à partir de ce que nous en connaissons sur les côtes nord-africaines et, plus étroitement encore, sur les côtes ifriqiennes (La Tunisie actuelle augmenté du département de Constantine à l’Ouest et de la Tripolitaine à l’Est). Il est en effet encore difficile, dans l’état actuel de nos connaissances, de voir dans quelle mesure nos “ribats” locaux diffèrent ou se rapprochent de ceux de l’Orient et de l’Occident musulmans d’une part, et des institutions analogues des pays chrétiens. Cette étude reste entièrement à faire. Et ce n’est pas un des moindres mérites de mon collègue M.Lézine, architecte principal des Monuments Historiques, que de présenter aujourd’hui à la savante compagne le résultat de ses investigations à l’intérieur de deux de ces monuments: les ribats de Sousse et de Monastir, et de fournir, partant, une contribution précieuse à l’éclaircissement du problème. Dans une longue “note sur les ribats en Berbérie” - (Mélanges René Basset, t, II), M. Georges Marçais en avait donné, en 1925, une documentation très fouillée qui conserve encore, aujourd’hui, entièrement sa valeur, il est vrai que depuis, des textes nouveaux ont vu le jour, en particulier la “Riyad An-Noufous” d’Al-Maliki qui apporte des renseignements neufs sur la question. Ils n’en modifient d’ailleurs pas, pour autant, l’aspect. Mais la grande nouveauté réside dans le résultat des derniers travaux archéologiques dont nous ferons précéder l’exposé d’un bref compte rendu sur la nature du “ribat”. Les premières expéditions arabes, en Ifriqia, avaient surtout des raids, suivis de replis rapides. Assauts fulgurants et irrésistibles, mais sans lendemain. L’adversaire, berbère ou byzantin, momentanément, sous l’effet de la surprise, mai n’étaient pas abattu. Aussi, se ressaisissait-il, pour reprendre en main le terrain perdu, et lorsque le conquérant arabe revenait à la charge, il ne pouvait profiter des succès antérieurs, et tout était à recommencer. C’est pour conserver ces avantages, qu’il fut amener à tenir garnison dans le pays et à construire Kairouan. Par la suite, les incessants soulèvements berbères lui feront établir un limes dont les troupes arabes occuperont les citadelles. Mais, le péril le plus grand venant de la mer, c’est de ce côté surtout, qu’il faudra se défendre en raison des incursions répétées des chrétiens dont la ferme résolution d’occuper le pays ne se démentit jamais. C’est ainsi que naîtra le “ribat”, forteresse maritime, ouvrage défensif dès l’abord, devenu offensif par la suite, lorsque ayant acquis la maîtrise de la mer, les Musulmants s’en serviront comme bases d’embarquement, en particulier, pour conquérir et tenir en main la Sicile. Ces “ribats” seraient de simples citadelles, comme l’Antiquité et le Haut Moyen Age en ont connues, sans cette particularité que leurs hôtes y venaient s’offrir pour la guerre sainte, le “jihad” et rechercher une fin enviée : la mort des martyrs pour la Foi. En attendant cette occasion on s’adonnait aux pratiques monastiques. Cette particularité assimile le “ribat” à un couvent fortifié de moines guerriers. Entreprise dès les premières années de la conquête arabe, très vraisemblablement, l’organisation des “ribats” s’épanouit au IXème siècle. Les “ribats connus jusqu’ici sont celui de Monastir (180/796 ap. J.C) et celui de Sousse (206/821 ap. J.C, date habituelle à rectifier). Ils revêtent aujourd’hui une grande importance grâce aux travaux de M. Lézine. Il en existe néanmoins beaucoup d’autres que nous avons pu repérer au cours de nos prospections, lesquelles d’ailleurs ne sont pas encore achevées. La petite ville de Soliman conserve encore, à peu près intact, un petit ribat, transformé aujourd’hui en mosquée (la mosquée Al-Blayda). On peut également voir à Dar-Chaabane un autre sanctuaire (Sidi Hâll), aile conservée d’un ribat disparu. D’autres édifices ont été transformés en forts d’artillerie, à l’époque turque (XVIIème siècle). C’est le cas des borjd de Bizerte, de Kélibia, de Hammamet, de Mahdia, etc... On en trouve également dont les tours seulement ont survécu, comme cette tour de Bou Ficha près de laquelle il est encore aisé de retrouver par terres les traces de l’ancienne forteresse, en particulier, une tour d’angle émergeant à 1 mètre du sol. C’est le cas aussi, de la tour dite “Borj Khadija” à 30 kilomètres au Sud de Mahdia, de la tour de Qasr Ziyad à Djebeniana, de la tour Sidi Mansour à 10 kilomètres au Nord de Sfax. Signalons aussi celles du Nador au Sud de la Skhira. Deux autres ribats méritent une mention particulière : celui de Lamta, dont le rz-de-chaussée est à peu près intact, et celui de Yonga dont toute l’enceinte est conservée. L’enceinte de ce dernier est solidaire d’une enceinte plus vaste qui rappelle le système défensif que l’on croyait jusqu’ici une innovation hafsite (XIIIème siècle et les siècles suivants). L’emplacement d’un grand nombre d’autres forteresses, bien que rasées, a été repéré. C’est le cas de Qasr At-Toub (aujourd’hui zaquiat Sidi Abd el-Hamid), à une lieue au Sud de Sousse, de Qasr Qorba (ancienne grande mosquée de Korba), de Qasr Herla, l’antique Horrea Coelia (esplanade de la Grande Mosquée), de Qasr Naqqata au Nord de Maharès, du Qasr de Maharès, transformé depuis très peu de temps en grande mosquée. Bornons-nous ici à cette courte liste. Nous aurons tout loisir pour revenir là-dessus, notamment pour décrire certaines particularités architectoniques d’un grand intérêt : à Mahdia, voûtes d’arête en pierre de taille calibrées, affectant l’allure de dômes très surbaissés ; à Dar Châabane, niche surmontée d’un cul-de-four en coquille, etc... Des dernières observations, il apparaît que l’archéologie promet les enseignements les plus précieux pour une meilleure connaissance de la question. En attendant, bien entendu, que voient le jour quelques-uns des nombreux ouvrages arabes consacrés au “ribat” et dont seuls les titres nous sont parvenus. Slimane Mustapha Zbiss Page: BACK 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 NEXT |
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